Avez-vous déjà ressenti à distance et sans comprendre le comment du pourquoi, l’émotion d’un proche, que celle-ci soit une grande joie ou un sentiment de désespoir ? Vous vous rappelez certainement avoir localisé précisément ce ressenti soudain et fort dans vos entrailles… et vous pouvez encore en témoigner maintenant.
Parfois la sensation ressentie est bien liée à une information exacte. Vous comprenez ainsi après coup que l’événement ayant suscité l’émotion du proche et votre ressenti simultané sont liés, que votre intuition était juste. Aujourd’hui, les recherches scientifiques montrent que ce ressenti, quasi instinctif, ou autrement dit ces sensations « qui nous prennent aux tripes », sont effectivement valides et donc porteuses d’information.
Une étude menée par Dean Radin, chercheur principal à l’Institute of Noetic Science en Californie, et sa collègue Marilyn Schlitz démontre que l’information provenant de telles sensations résulte notamment de l’état émotionnel et des pensées d’une autre personne. Et que ce sont les sentiments positifs et ceux de tristesse qui ont le plus gros impact. Elle souligne aussi que le cerveau n’est pas le seul organe à recevoir et à traiter des informations intuitives… En effet, une autre zone du corps, pour le moins inattendue, est également un récepteur d’informations perçues à distance.
En pratique
Dans cette étude, 52 individus firent un total de 206 tests. Deux individus, un sujet émetteur et un sujet récepteur, étaient placés dans deux salles séparées. On présentait au sujet émetteur des stimuli visuels, de tonalités diverses (positives, négatives ou neutres), alors que celui-ci observait simultanément le sujet récepteur sur un écran vidéo. Des électrodes étaient placées dans la région ventrale du sujet récepteur pour enregistrer les variations dans cette zone.
Les résultats montrèrent que la réaction du sujet émetteur aux stimuli, spécialement lorsque ceux-ci étaient positifs ou tristes, avait pour corrélat une réaction dans le ventre du sujet récepteur, réaction qui transmettait alors un influx nerveux au cerveau.
Ces résultats sont significatifs et indiquent que le cerveau n’est pas l’unique source d’information chez l’être humain. En outre, l’information reçue par nos entrailles peut être obtenue, à distance et sans perception physique directe, via une autre personne.
C’est vrai que la plupart d’entre nous n’a aucune envie de regarder de près ce qui se passe au niveau de son système digestif, qui transforme la nourriture et produit les déchets organiques. Dès lors, nombre des sensations intuitives qu’il envoie et qui s’avèrent correctes sont soit ignorées, soit attribuées à la chance. Pourtant, les recherches tendent à montrer que le fonctionnement de ces organes est plus complexe qu’on le pensait, et les scientifiques s’y réfèrent même comme à un “deuxième cerveau”.
Les intestins, par exemple, regorgent d’importants neurotransmetteurs – 100 millions environ– ce qui explique que l’information reçue soit relayée jusqu’à notre cerveau. Le fait d’avoir des papillons dans l’estomac constitue un bon exemple de ce fonctionnement : ces palpitations signalent au cerveau que nous sommes nerveux.
Au vu de ces résultats, la question se pose de savoir s’il faut utiliser uniquement notre intellect pour prendre des décisions, ou bien s’intéresser d’abord à ces sensations primaires émergeant dans notre ventre, puis faire appel à l’intellect pour déchiffrer leur message et ensuite seulement se décider.
Application gagnante
Mettre cette découverte en pratique peut s’avérer avantageux. Quelles en sont les implications pratiques?
Imaginez que vous soyez en train de conclure une transaction qui semble des plus juteuses. Et pourtant, vos tripes vous alertent: “Attends !”, “attention !”, et vous avez l’estomac qui se tord. En s’intéressant à ces ressentis et en laissant de côté l’intellect pour un moment, peut-être une alternative se dessinera-t-elle qui permettra de réexaminer le contrat que vous êtes en train de lire, et de faire les changements nécessaires plutôt que d’apposer précipitamment votre signature, au risque de commettre une erreur coûteuse et dommageable.
Ainsi la vision simpliste que nous avons de nos intestins ou de notre estomac paraît-elle dépassée et incomplète. Avoir une idée plus claire de comment nous recevons de l’information par le corps peut renforcer notre capacité à identifier et à analyser clairement notre intuition. Cette connaissance nous permettra en retour de mieux comprendre les dynamiques cachées qui sont à l’œuvre dans bien des situations importantes et de faire face plus facilement aux défis de la vie.
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Source : Gut feelings, intuition, and emotions : an exploratory study.(fichier PDF)